L'homme appartient aux Primates
L'homme partage le groupe des Primates avec un certain nombre d'animaux, dont les singes. Tous les primates sont caractérisés par la présence d'un pouce opposable aux autres doigts. Parmi les primates nous allons nous intéresser à quatre groupes et essayer d'en retrouver les relations phylogénétiques.
Les Lémuriens.
Caractéristiques de la faune de Madagascar, les Lémuriens sont des animaux de petites tailles à vie essentiellement arboricole. Une de leur caractéristique est la présence d'incisives disposées en peigne dentaire.
Le Propithèque (étymologiquement, "l'avant-singe")
Le peigne dentaire des Lémuriens
Un autre lémurien, le Aye (Daubentonia madagascarensis)
Un Tarsiiforme, le tarsier spectre qui vit aussi à Madagascar. Animal nocturne dont on voit les doigts.
Les Platyrrhiniens (étymologiquement, "nez plats")
On réuni sous ce terme, les singes d'Amérique qui présentent un certain nombre de caractères communs qui les différencient des singes d'Afrique et d'Asie. Le plus célèbre est l'Atèle ou Singe-Araignée
L'Ouakari à tête rouge
L'Atèle
Les Cercopithécidés
Parmi les singes de l'Ancien Monde (Europe-Asie-Afrique), un groupe est particulièrement développé, celui des Cercopithécidés (étymologiquement, "singes à longue queue"). Le plus caractéristique du groupe est le Babouin.
Les Hominoïdes
On réunit sous le terme d'Hominoïdes (étymologiquement, "qui ressemblent à l'homme), les grands singes comme le Gorille ou le Chimpanzé ainsi que l'homme qui est lui aussi un grand singe. Nous nous intéresserons plus particulièrement à 4 espèces.
Le Gorille (Gorilla gorilla)
Le Chimpanzé (Pan troglodytes)
Le Bonobo ou Chimpanzé pygmé (Pan paniscus)
L'homme (Homo sapiens)
Les grand singes et l'homme
La comparaison entre les singes hominoïdes et l'homme peut se faire selon différents critères :
— des critères chromosomiques
— des critères morpho-anatomiques (squelette)
— des critères comportementaux
Les critères chromosomiques
On constate que le Gorille et le Chimpanzé possèdent le même nombre de chromosomes (24 paires) alors que l'Homme n'en possède que 23 paires. En regardant avec attention, on constate que la paire numéro 2 chez l'homme provient d'une suture entre deux paires de chromosomes du Chimpanzé. En outre on peut observer des réorganisations (inversion, translocations) des parties de chromosomes entre le Chimpanzé et l'Homme.
Malgré ces variations, on estime que l'Homme et le Chimpanzé partagent 98,5% de leur ADN. On peut aussi analyser les différences entre les Hominoïdes au niveau de la composition en acides aminés d'une protéine déterminée. On prend ici le cas de l'hémoglobine epsilon et on construit l'arbre de parenté.
* Le Gélada (Theropithecus gelada) est un Cercopithécidé.
Dans ce cas, le Bonobo est un peu plus éloigné mais pour d'autres molécules ce sera le Gorille ou le Chimpanzé.. Il y a donc une proximité très étroite entre les différents Hominoïdes.
Les critères morphologiques
Plusieurs critères peuvent être pris en compte
a) les paramètres crâniens
On peut mesurer facilement l'angle faciale d'un Hominoïde.
La comparaison de la mesure entre le Chimpanzé et l'Homme montre un angle de près de 90 ° pour Homo sapiens, alors qu'il est de 45° environ chez Pan troglodytes.
Il y a donc présence d'un prognathisme développé chez le Chimpanzé. Une seconde caractéristique sépare le crâne du Chimpanzé et celui de l'Homme : l'absence d'un front chez le premier qui est au contraire, très développé chez le second. Le rapport hauteur/longueur du crâne le met en évidence. Le développement du front est le signe du développement des hémisphères cérébraux chez l'homme.
Une troisième caractéristique est la position du trou occipital :
Le trou occipital est centré chez l'Homme alors qu'il est situé vers l'arrière du crâne chez les grands singes. Sa position est en relation avec la position anatomique de l'individu, bipède chez l'Homme, quadrupède chez les Grands Singes.
b) les paramètres squelettiques
En ce qui concerne le bassin, il est long et étroit chez le Chimpanzé alors qu'il est large et court chez l'homme. Cette particularité est liée à la position des fémurs, parallèles chez le Chimpanzé et qui se rapprochent au niveau des genoux chez l'homme, elle même en relation avec la démarche bipède ou quadrupède.
Toujours liées à la position du squelette, les courbures de la colonne vertébrale ne sont pas les mêmes chez le Chimpanzé et l'Homme. On remarquera que la position de la colonne vertébrale commande la position du trou occipital.
En ce qui concerne les pieds, on peut remarquer que le singe présente des pouces opposables, ce qui n'est pas le cas de l'Homme. On est dans le cas d'une adaptation à la vie arboricole pour le singe et pour la vie terrestre dans le cas de l'homme.
Le comportement des Grands Singes
Le déplacement des grands singes est essentiellement quadrupède. La position des mains est particulière et connue sous le nom de knuckle walking.
Knuckle walking chez le Chimpanzé
Knuckle walking chez le Bonobo
Parmi les Grands Singes, c'est chez le Bonobo que la démarche est le plus souvent bipède, notamment lorsque l'animal utilise un outil.
Alors que pendant très longtemps, l'utilisation d'outils a été considérée comme une spécificité humaine, on peut constater que les Chimpanzés utilisent des outils variés.
Utilisation d'une branche servant à récupérer des termites dans une termitière
Utilisation d'une pierre pour écraser les os dont les singes sont friands de la moelle
Les Chimpanzés vivent en tribus. On a constater que selon les tribus, les outils ne sont pas les mêmes et les techniques ne sont pas les mêmes. Il y a donc une véritable culture propre à chaque tribu de Chimpanzé.
Une autre caractéristique commune aux Grands Singes est la relation étroite qui lie la mère à son enfant.
Les relations sociales sont établies dans une tribu par des rituelles marquant la hiérarchie. La hiérarchie permet une cohésion du groupe, nécessaire à sa survie.
Chez les Bonobos, ce sont les relations sexuelles qui apaisent souvent les tensions sociales. Ces relations peuvent se faire entre singes de sexes différents, de même sexe et entre les adultes et les petits. Les Bonobos font l'amour de face, contrairement aux Chimpanzés, avec des gestes d'une grande tendresse. On les surnomme parfois, les singes Kama-Soutra.
Face à un miroir, les Chimpanzés perçoivent très vite qu'ils ont en face d'eux leur propre image. Ils se livrent alors à de nombreuses grimaces mettant en évidence, l'existence d'une certaine conscience de soi.
Une étude particulièrement intéressante a été menée par le professeur Savage-Rumbaugh sur un Bonobo né en captivité en 1980 et baptisé Kanzi. A 32 ans, Kanzi connaît 350 signes provenant d'un répertoire appelé lexigramme.
Kanzi avec le professeur Savage-Rumbaugh devant le lexigramme
Kanzi comprend actuellement environ 3000 mots et des phrases qui ne sont pas apprises. Ses capacités d'apprentissage sont restés les mêmes, contrairement à ce que pensaient les scientifiques, qui estimaient que les Grands Singes ne pouvaient plus apprendre au delà d'un certain âge. En 2011, Kanzi a appris à faire du feu et la cuisine.
Quelques étapes de l'évolution des Homininés
L'origine de la lignée humaine reste assez imprécise.
C'est à partir de Toumaï (Sahelanthropus tchadendis) daté aux environs de -7 millions d'années qu'une bipédie permettant la marche au sol semble apparaître. Cependant la restauration du crâne de Toumaï a entraîné des polémiques sur sa datation qui reste hypothétique.
Reconstitution du visage de Toumaï
En 1974, une équipe dirigée par le français Yves Coppens et l'américain Donald Johanson découvre en Ethiopie le squelette presque complet d'un Australopitheque baptisé Lucy.
Lucy fait partie de l'espèce Australopithecus afarensis et est datée environ -3 millions d'années. Les Australopithèques forment un groupe complexe de plusieurs espèces qui ont vécu à des périodes et dans des zones variées, toujours en Afrique.
Crâne d'Australopithecus africanus (-2,5 millions d'années)
Reconstitution de la face d'un Australopithèque
En 1976, on a découvert à Laetoli en Tanzanie, des traces de deux Australopithèques (un adulte et un petit) conservées dans les cendres volcaniques.
C'était une preuve incontestable que les Australopithèques se déplaçaient de manière bipède. Cependant la forme du pied et la forme du bassin entraîne que la démarche des Australopithèques était très différente de la notre.
Plus ou moins rattaché aux Australopithèques, Paranthropus robustus est caractérisé par une face large et une crête sagittale développée chez le mâle. Il aurait vécu jusqu'à -1 millions d'années.
On a donc plusieurs espèces d'Homininés qui vivent en même temps (Australopithèques, Paranthropes et premiers Homo) sur le même continent.
Crâne de Paranthropus robustus
Reconstitution de Paranthropus robustus
Vers -2,5 millions d'années, apparaît toujours en Afrique une nouvelle population, Homo habilis.
Reconstitution de la face d'Homo habilis
On associe, en général, la culture des galets aménagés (Pebble culture) à Homo habilis. Cependant, la découverte ultérieure de restes d'Australopithèques sur le même site remet en question cette attribution.
Un exemple de galet aménagé
Un autre groupe apparaît en Afrique vers - 1 millions d'années : Homo erectus. C'est un groupe aux caractéristiques très variés tant sur la taille, que sur le volume cérébrale (800 à 1200 cm3) ou les caractéristiques faciales. Il ne s'agit en aucun cas d'une espèce au sens strict du terme.
Crâne d'un Homo erectus, l'Homme de Tautavel (France) daté - 450 000 ans
Homo erectus est le premier Homininé à quitter le berceau africain. Il va coloniser l'Europe, le Proche-Orient et l'Asie dans son entier, y compris l'Indonésie.
Reconstitution d'un Homo erectus
L'industrie d'Homo erectus est beaucoup plus variées que celle d'Homo habilis. L'objet le plus caractéristique est le biface, véritable "couteau suisse" de la Préhistoire et qui traverse toutes les cultures qui se sont succédées.
La taille des objets devenant très précise, on estime qu'une spécialisation du travail s'est rapidement installée. De fait, on trouve dans certains sites un tel nombre de pièces taillées qu'on peut estimer qu'il existait de véritables ateliers de taille de pierre.
Descendant sans doute d'Homo erectus (c'est une hypothèse non démontrée), un groupe s'est développé en Europe, au Proche-Orient, en Iran, en Mongolie et des travaux actuels semblent en trouver la trace en Chine du nord, Homo neanderthalensis (vers -100 000). Le volume crânien de H. neanderthalensis est légèrement supérieur à celui de Homo sapiens mais la forme du crâne est différente.
Crâne d'Homo neanderthalensis
Reconstitution du visage d'une femme néanderthalienne (au charme un peu farouche !)
D'un point de vue morphologique, H. neanderthalensis est plus petit et plus trapu qu'H. sapiens. On relie cette morphologie à une adaptation au froid, puisque l'extension maximale des Néanderthaliens correspond à la glaciation würmienne (cf. la morphologie des Inuits actuels).
Squelette comparé d'un H. neanderthalensis (à gauche) et d'un H. sapiens (à droite)
Les relations entre les deux espèces ne sont pas clairement établies. Les dernières analyses génétiques de l'Institut d'Anthropologie de l'Université de Leipzig en 2010, montre une communauté de gènes. Cela pourrait signifier qu'une interspécificité a certainement eu lieu avant que les deux espèces ne divergent trop.
D'autres travaux plus récents (2014, 2016) montrent pourtant des cas d'hybridations tardives (vers —40 000) et des travaux d'immunologie semblent montrer l'influence du Néandertal sur l'immunité des populations d'Homo sapiens européennes.
Les Néanderthaliens semblent avoir disparus en même temps que régressaient leurs gibiers constitués d'animaux inféodés au froid, comme le Mammouth, le Bison ou le Rhinocéros laineux. D'autres hypothèses (éruption des Champs Phlégréens vers -36 000) ont été évoquées.
L'industrie néanderthalienne, appelée culture moustérienne est caractérisée par des racloirs, pointes de flèches et bifaces d'une taille assez simple.
On a retrouvé des sépultures néanderthaliennes du même type que celles installée par Homo sapiens.
Homo sapiens est d'origine assez mystérieuse. Contemporain d'Homo neanderthalensis, il survit à celui-ci et conquiert l'ensemble de la planètes.
Crâne de l'Homme de Cro-Magnon, Homo sapiens
La taille des outils devient de plus en plus précise, voire minutieuse comme dans le cas des "feuilles de laurier" d'une très grande finesse, exécutées au Solutréen (-20 000).
Construire un arbre phylogénétique des Homininés est donc particulièrement difficile et toujours hypothétique. L'arbre ci-dessous est du type de celui qu'on obtient avec le logiciel Phylogène.
On ne peut absolument pas construire un tel arbre car on ne connaît pas les liaisons entre les différents groupes d'Homininés. La figure ci-dessous est déjà plus proche des éléments connus actuellement.
On parle d'évolution buissonnante pour indiquer que les différents groupes ne présentent pas de liaisons simples. En réalité, ce qu'on sait des relations entre les différentes espèces d'Homininés est indiqué sur le tableau ci-dessous : pas grand chose !
Mais avant tout, oubliez ce modèle de l'émergence humaine qui est encore utilisé dans la pub ! L'Homme n'est pas plus évolué que le singe. Simplement, les voies d'évolutions ont été différentes.
Origine du peuplement actuel
On sait qu'Homo erectus a peuplé l'Europe, le Moyen-Orient et l'Asie. Pour l'Europe et le Moyen-Orient, on sait que deux groupes lui ont succédé, Homo neanderthalensis et Homo sapiens, ce dernier restant seul après - 30 000 environ.
En ce qui concerne la population actuelle de l'Asie, trois hypothèses ont été proposées :
La première, appelée classiquement "out of africa", estime que la population mondiale actuelle à pour origine un groupe de quelques milliers d'H. sapiens d'origine africaine.
La seconde, dite "multirégionale" propose l'idée que chaque population d'H. erectus a évolué indépendamment pour donner des H. sapiens.
Dès sa publication, cette hypothèse à soulevé des oppositions par le fait que l'évolution indépendante des groupes (en fait une spéciation), ne permettait pas d'expliquer l'interfécondité actuelle des différentes populations humaines.
La troisième hypothèse, dite "intermédiaire" vise à corriger ce manque en proposant des échanges constants entre les différents groupes de façon à maintenir une interfécondité possible.
Pour résoudre ce problème, on a utilisé une technique particulière : l'utilisation de l'ADN mitochondrial.
Les mitochondries sont organites cellulaires assurant la respiration. Comme se sont d'anciennes bactéries endosymbiotiques, elles possèdent leur propre ADN.
Lors de la fécondation, seul le noyau du spermatozoïde pénètre dans l'ovocyte. Cela signifie que les mitochondries d'un individu proviennent toutes de la mère.
Grâce aux empreintes génétiques de l'ADN mitochondrial, on peut donc reconstituer une hérédité même lointaine en tenant compte, bien sûr, de la dérive génétique.
Le prélèvement d'ADN mitochondrial sur des sujets appartenant à la population originelle de différentes zones mondiales (Aborigènes d'Australie, Maori de Nouvelle-Zélande, Masaï ou Zoulou d'Afrique, natifs d'Amériques) a permis de démontrer en 2007 que toutes ces populations avaient leurs racines chez un H. sapiens d'origine africaine. C'est le modèle dit de "l'Eve mitochondriale".
Bien entendu, ce modèle peut être remis en cause à tout moment, si des faits contraires étaient mis en évidence.
Homo sapiens est actuellement le seul Homininé vivant. Ce ne fut pas toujours le cas. Le processus d'apparition et de disparition des différentes populations qui se sont succédées et cotoyées reste en grande partie inconnu.